Un service de renseignement entre psychiatrie et diplomatie
Historiquement, le service de renseignement algérien et son supplétif malien ont produit des monstres et des psychopathes ayant éliminé des centaines de milliers de leurs propres compatriotes autant que le colonialisme. Le chiffre des victimes innombrables de ces « services » et appendices n’a épargné personne : penseurs, intellectuels, artistes, hommes d’affaires, hommes politiques, élus, femmes, enfants, vieillards, cela au nom de principes démagogiques et fallacieux.
Le colonel Abdelhafid Boussouf, géniteur de cette doctrine à Oujda, dans la maison de Bouabdallah, a créé, au siècle dernier, une machine de crime qui n’a rien à envier à la maffia qui elle dispose au moins d’un code d’honneur respectant la femme, l’enfant, les lieux de cultes et les ancêtres. Cette mécanique utilise abondamment tous procédés mafieux tels que corruption, menaces, torture, assassinats ciblés et collectifs, prise d’otage, incitation à la haine, antisémitisme et autres intimidations ou atteintes aux droits humains les plus élémentaires. Elle n’a rien à envier non plus aux machines à broyer du nazisme et du stalinisme : la seule différence est que ses sectateurs n’ont pas eu les compétences techniques et les mêmes opportunités dans les mêmes espaces et contextes géopolitiques, toutes proportions gardées. Cette fabrique de sang et de larmes a commencé à fonctionner dés la création du comité d’organisation militaire (COM) devenu MALG (Ministère de l’Armement et des Liaisons Générales), puis remplacée par la Sécurité militaire après l’indépendance ou SM (appelé par les Algériens « Sport et musique »). Son géniteur sera lui même éliminé par son dauphin le colonel Kasdi Merbah, ancien infirmier à l’hôpital du 20 août de Casablanca sur les ordres du colonel Boukharouba, alias Boumediène. Actuellement, le DRS (Département de Renseignement et de Sécurité) dispose d’un arsenal de méthodes et d’une panoplie d’outils de propagande et de dénigrement de ses ennemis. Il semble vouloir surpasser ses maîtres de la première heure notamment la Stasi et le KGB, aujourd’hui FSB. Cette doctrine s’est répandue dans plusieurs pays africains et arabes.
Ce bref rappel historique sur la genèse d’un service de renseignement qui produit des psychopathes explique la campagne médiatique orchestrée contre la France suite à la fuite de la militante pacifique Amira Bouraoui.
Depuis les indépendances de l’Algérie et du Mali, les deux pays voisins ont toujours fait partie de la politique de la France. De même la France est considérée comme un catalyseur et une variable d’ajustement de l’opinion publique de ces deux pays. La France est toujours vénérée sollicitée et souvent calomniée ou diffamée pour un oui ou un non. Cette démagogie que les algériens sont habitués à entendre depuis toujours est une instrumentalisation qui a pour seule objectif de prétendre flatter une population dans l’unique but d’assurer la survie du régime afin de prétendument souder un micro-nationalisme factice. Le même phénomène se reproduit à Bamako depuis son indépendance en 1960. Les affaires d’Amira Bouraoui et d’Aminata Dicko (militante malienne des droits de l’Homme) ont suscité beaucoup d’interrogations sur les causes réelles de la colère de ces deux pays africains contre la France et trouvent dans les deux cas une occasion à vil prix pour s’acheter une virginité politique intérieure et une pseudo légitimité.
En Algérie, la fuite d’Amira Bouraoui, militante pacifique depuis 2014, est l’occasion en or pour l’oligarchie militaire d’Alger de tenter de redorer le blason d’un président impopulaire que l’on cherche à désigner pour un deuxième mandat. Un clan de militaires formés à l’école du KGB essaie d’exploiter cet événement afin d’avorter tout rapprochement avec l’Occident en propageant des rumeurs selon lesquelles Abdelmadjid Tebboun serait physiquement menacé à Paris par les « ennemis de l’Algérie » : la France, Israël, la franc-maçonnerie et le Maroc. Cette théorie du complot propagée dans les réseaux sociaux proches du DRS vise à terroriser le président Abdelmadjid Tebboun et l’amener à annuler sa visite en France. Il n’est d’ailleurs pas exclu que les sbires du service de renseignement algérien passent à l’acte comme ils l’ont fait avec Abane Ramdane, Krim Belkacem, Mohammmed Khider, Mohamed Khemisti, Mohammed Boudiaf, Abdelkader Chabou, Aboubaker Belkaid, Ahmed Medeghri, etc. L’histoire de ce service est jalonnée de meurtres connus, méconnus ou inconnus.
Par cet affront fait à la France, en épargnant le président Emmanuel Macron, se focalisant sur les services de renseignement extérieur français et le ministère des affaires étrangères, Alger veut montrer ou laisser accroire que la France est dirigée par un ensemble de lobbyistes et d’agents à la solde de puissance extérieures à l’hexagone. L’affaire Amira Bouraoui a donné lieu à un débat délirant orchestré officiellement par le pouvoir militaire en mobilisant ses sbires de Montréal à Londres en passant par Paris et Madrid. À tel point que l’on parle de rupture entre les deux pays, et de report de la visite d’État à Paris d’Abdelmadjid Tebboun prévue pour le mois de mai. Dans les forums proches du pouvoir algérien, on recommande aux Algériens de l’hexagone de quitter le pays et de retirer leurs avoirs des banques françaises.
Un troisième argument est utilisé par la propagande d’El-Mouradia pour humilier cette militante et détruire son image auprès de l’opinion publique algérienne en l’accusant de traître à la nation et d’être un agent des services spéciaux français. Cette accusation gratuite est sans fondement tangible sur l’implication de la France dans la décision personnelle d’Amira Bouraoui de quitter l’Algérie. Cette dernière a déclaré haut et fort dans les médias que son passage clandestin en Tunisie était dûment réfléchi, sans le soutien de personne mais facilité par des frontières poreuses habituellement traversées par les contrebandiers de toujours parrainés par les généraux algériens. Finalement, Amira Bouraoui se demande pourquoi l’élite politique et intellectuelle fuit l’Algérie. Elle aurait aimé tenter l’expérience meurtrière des harragas (clandestins) par voie de mer.
Dans ce contexte tendu de rapports franco-algériens, le pouvoir algérien a aussi instrumentalisé la religion musulmane, les salafistes et les frères musulmans, en présentant cette combattante pour la liberté et l’État de droit comme une femme laïque, athée, encadrée par la franc-maçonnerie internationale, poursuivie pour offense à l’Islam, accusation qui lui a valu une peine de deux ans de prison non exécutée. Le pouvoir algérien diffuse ces allégations au sein de la diaspora en Europe et en Amérique du Nord. Cet acte constitue un véritable appel au meurtre d’Amira Bouraoui, fille d’un moujahid (ancien combattant) et ancien général de l’armée nationale populaire (ANP). les réseaux sociaux proches du pouvoir algérien n’ont épargné personne de leur colère qui relève beaucoup plus de la psychiatrie que de la diplomatie ou de la politique.
L’avalanche de dénigrement d’insultes, d’accusations gratuites, ne touche pas seulement la France en tant que peuple et pays mais aussi la Tunisie, le Maroc, Israël, le sionisme international, la Franc- maçonnerie, les khabarji (« espions algériens travaillant pour le compte de la France et du Maroc »). Cette aberration est un leurre qui masque la guéguerre entre les clans au sommet de l’oligarchie politico-militaire algérienne entre pro-occidentaux et pro-russes, entre les partisans d’un deuxième mandat de Abdelmadjid Tebboun et ceux qui sont défavorables à une désignation du président sortant. Cette lutte intestine qui se manifeste sur la toile, traduit une nervosité et la crainte « d’une éventuelle invasion de l’Algérie à partir de la méditerranée à la façon de la baie des Cochons des années soixante, à Cuba » selon les propres termes d’un communiqué officiel de la présidence de la République algérienne et publié par l’Agence de presse service algérienne (APS).
Le décryptage de leur propagande indique que les militaires algériens considèrent l’affaire Amira Bouraoui comme une chance leur permettant de justifier un revirement quant à leur engagement de coopération sécuritaire et militaire pourtant signé dans la feuille de route dernièrement à Paris par le chef d’État major algérien. Ce jeu de caméléon servira sans aucun doute les intérêts stratégiques de la junte et de la Russie qui exerce des pressions énormes sur le système politico-militaire d’Alger.La junte peut ainsi réaffirmer son alignement sur la Russie qui demeure son allié stratégique dans le système politique international.
Les tenants du pouvoir algérien suivent leur doctrine machiavélique alignée sur la Russie tout en s’agrippant sans vergogne au fantôme des accords d’Évian de 1962 considérés comme symboliques par Xavier Driencourt, ex-ambassadeur de France à Alger. Ils profitent aussi de l’accord d’immigration de 1968 qui donne beaucoup d’avantages aux Algériens en France et dans les pays Schengen. La présence algérienne en France est estimée à 6 millions de personnes, sans compter les clandestins. Les attachements historiques, politiques et humains entre les deux rives sont nombreux et complexes. Cette énième crise entre les deux pays relève du déjà vu, maintes fois ressassé. La pratique de l’anamorphose des services algériens atteints de narcissisme pervers pathologique ne trompe plus personne. À force de répétition, la chimère mise en scène se révèle au grand jour. Sans doute, ne fera-t-elle plus ni recette, ni illusion.
Sahara-central.info, la rédaction
Le triumvirat
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